1976, Guatemala. En pleine dictature Maria, une militante opposée à la junte militaire, voit son mari se faire assassiner sous ses yeux. Contrainte de fuir, sous une nouvelle identité, au Mexique, elle confie son fils, Marco, âgé de quelques mois, à sa mère. Menant une vie clandestine, elle garde le contact avec ce fils qu’elle connaît mal jusqu’au jour où, dix ans plus tard, sa mère lui annonce qu’elle ne pourra plus s’en occuper. Marco la rejoint alors, au moment même où, à la veille de la Coupe du monde de football, Maria tente de rendre publiques, à travers un article de presse, les exactions commises par l’État guatémaltèque...

Né au Guatemala en 1978, César Diaz s’est fait remarquer à Cannes en 2019, où son premier long métrage, Nuestras madres, a reçu la Caméra d’or. Comme lui, Mexico 86 emprunte également à l’histoire de son pays. Parfaitement documenté et avec une forte part autobiographique (le film est dédié à sa propre mère et César Diaz y retrace une partie de sa propre enfance), nous sommes pourtant dans un thriller politique, souvent haletant mais délivré avec tendresse et sincérité. Ce portrait de femme est aussi l’hommage touchant d’un fils à sa mère, qui rappelle que la dictature militaire alors au pouvoir au Guatemala était tout autant cruelle que celle qui sévissait au Chili ou en Argentine.

Si le cinéaste s’empare des codes du film d’espionnage, c’est sans jamais abuser d’effets ou de démonstrations, mais en sachant poser beaucoup de questions justes. Comme il le dit lui-même : « Quel est le prix à payer pour avoir des convictions fortes ? Maria laisse tout derrière elle, son fils, son pays, sa famille. Mais je suis convaincu que pour qu’il existe une véritable transformation sociale profonde, il faut des gens comme ça. Si on est tiède face à la dictature, face aux injustices, on ne peut rien changer. Est-on une meilleure mère en restant auprès de son fils, ou en construisant un monde différent pour son fils ? La plupart des hommes qui ont lutté avaient des enfants, et ne se sont jamais posé la question. Ils ont confié les enfants à la mère, sans se retourner, fiers d’avoir combattu. Dans l’imaginaire collectif un père qui part à la lutte est un héros, une mère qui fait la même chose est irresponsable ».

Intime, politique, historique, Mexico 86 mêle habilement fond et forme. Et Bérénice Bejo est pour beaucoup dans cette réussite, elle dont les parents ont rejoint la France pour fuir la dictature militaire en Argentine. Ce parallélisme familial avec son réalisateur n’est sans doute pas pour rien dans la puissance de son incarnation.

JF